*Encore une belle journée à l’horizon. L’hiver est toujours là, mais la nouvelle saison approche à grand pas. Et avec elle le gibier, les nouvelles plantes, et pourquoi pas de nouveaux chatons au sein des clans?*

Voilà la pensée avec laquelle je me réveillais se matin. M’étirant avec plaisir, je me dirigeais vers la maigre pile de gibier afin de prendre des forces pour la suite de mon apprentissage. Aujourd’hui, je devais aller seule en forêt récupérer de la menthe aquatique. Car le rôle d’un guérisseur ne se résume pas qu’à soigner les chats, c’est à lui aussi de récupérer les herbes dont il a besoin. Et ce sans escorte parfois. C’est pour cela que je devais y aller seule selon mon mentor. La rivière, ou du moins le petit ruisseau dans lequel on trouvait des plantes, était proche de toute façon, je ne craignais donc rien. Avec l’accord de Etoile de Nuit, Bulle Eternelle avait obtenu la permission pour que la jeune féline parte aujourd’hui récupérer les herbes. Mais revenons à nos chatons. Je remarquais que aujourd’hui encore, le gibier était une denrée rare. La saison des nouvelles feuilles n'était pas encore tout à fait là. Ne voulant point priver mon clan, je ne pris qu'une toute petite souris maigrichonne que je dévorai en deux trois coups de dents.

*Espérons que la nouvelle saison arrive rapidement…personne n’a encore perdu la vie, mais les anciens et les chatons sont de plus en plus faibles et donc, sujets aux maladies.*

Je sortiais donc de mon camp, direction le ruisseau. Le voyage fut court, car je connaissais le chemin par cœur pour avoir déjà étais cherchée des menthes là-bas. Et puis il n'était vraiment pas loin. Une fois sur place, je m’arrêtait face à de l’eau gelée. Complètement gelée. Comment allais-je donc faire pour récupérer les herbes tant convoitées? Hors de question de rentré les pattes vides. Ça c'était sur. Je ne voulais pas que Bulle Eternelle pense que j'étais une incapable qui renonçait au moindre problème.

*Bon, pas de panique. Les menthes aquatiques, ça poussent dans l’eau. Donc il me faut un autre point d’eau!*

Prenant mon courage à deux pattes, je s’enfonçait de plus en plus profond dans le territoire du clan de l'Ombre. Jamais je n’avais été aussi loin auparavant. Que ce soit seule, ou accompagnais.
Après plusieurs minutes de course épuisantes, je me stoppais net. Mon odorat et mon ouïe venaient de me signaler la présence d’une grande étendue d’eau. Ni une, ni deux, je partais dans cette direction, sans prendre garde à la terre que foulaient mes coussinets. Arrivée à l’eau, je me rendais compte que c'était une rivière bien plus grande que le pauvre ruisseau qui traversait les marécages. Hors je n’avais jamais entendu parler d’une telle source d'eau sur notre territoire. Qu’importe, le plus important était les herbes. Fixant le lac de mes yeux vairons, je ne sentais pas la présence qui se faufilée dans mon dos.

« -Mais où sont ses herbes à la fin? »

Je cherchais désespérément ses maudites herbes. Pourquoi fallait-il que cela m’arrive maintenant, alors que je m’étais perdue ? C’est toujours pour moi ces situations inexplicable qui ne manque pas de m’attirer des ennuis. Fixant le lac intensément, je captais enfin la présence des menthes aquatiques que je recherchais avec tant d’ardeur. Alors que j’amorçais un geste pour les récupérer, je fus violemment plaquée au sol, sans ménagement. Avec une surprise non dissimulée, l’odeur du clan de la Rivière prit possession de ma gorge. Ainsi je me trouvais sur leur territoire. Je m’étais fourrée dans une galère impossible. Et puis cette brute n’avait aucune pitié ! Ma tête avait rebondit durement sur le sol à cause de cette sournoise attaque. Je sentais mes poils se hérissés dans mon dos tandis que des brides de mon entrainement remontaient à la surface de ma mémoire. J’essayais de donner des coups de pattes dans le ventre de mon adversaire, mais je n’étais clairement pas du même gabarit. Je sentis alors que le félin baissait vers moi sa tête. Je ne pouvais voir de qui il s’agissait, puisqu’il me maintenait la tête contre le sol, tournée vers le lac. J’aperçus un court instant les herbes qui m’avaient mené dans cette situation délicate. Maudites soient-elles.

« Que fais-tu sur le territoire du Clan de la Rivière, Nuage d'Ombre? »

Je sursautais en entendant mon nom. Je n’aimais pas me savoir connue des autres clans, il m’était difficile d’inventer des excuses par la suite, ou de mentir sur mes origines. Bien sur je ne me fessais d’illusions, l’odeur de mort qui planait sans cesse sur moi devait suffire à me faire connaitre de la forêt entière. Je n’arrivais cependant pas à mettre de nom sur cette voix clairement féminine. J’avais affaire à une guerrière de toute évidence. Me débâtant plus furieusement encore, je ne répondis pas tout de suite. Cette position était abaissante et insultante, je n’aimais pas cela du tout. L’honneur de mon clan pesait lourdement sur mes frêles épaules d’apprentie à ce moment là. J’avais honte. J’avais baissé ma concentration à la limite de l’insulte et m’étais fait prendre comme une chatonne à peine sortie du ventre de sa mère. J’apercevais des touffes de poils marrons, mais n’arrivais toujours pas à reconnaitre mon adversaire. De plus la chatte n’avait prit la peine de se nommer, et me tenait toujours contre le sol de manière à ce que mon champ de vision ne se réduise qu’à une piètre vue sur le lac. Abandonnant l’idée d’arrivais à m’échapper, je stoppais tout mouvement, laissant ainsi mon cœur qui bâter la chamade se reposait un minimum. Mon souffle cependant ne ralentissait nullement, surement à cause de l’adrénaline. Je me remémorais ma rencontre avec une guerrier du chaos qui m’avait laissé dans le même état. Prenant à deux pattes mon courage, je lançais à la guerrière de la Rivière.

« -Tu peux me lâcher, je ne m’enfuirais pas et ne te blesserais pas. Tu me fais mal et tu es impolie. La moindre des choses si tu me connais aurait été de m’apostropher au lieux de me sauter dessus comme sur un vulgaire renard. Je suis une apprentie guérisseuse et en tant que telle, il me semble que tu peux te permette de me laisser un peu de mouvement, ne serrai ce que pour que je puisse voir qui me plaque si durement sur le sol. Tu aurais pus me fendre le crâne avec ta sauvagerie ! »

Oubliant que j’étais en position de faiblesse je me révoltais devant tant de méchanceté. Il m’était inadmissible que l’on traite ainsi les guérisseurs et imaginais que mon mentor aurait put être à ma place. Cela me remplit de colère. Je n’accepterais jamais qu’une chatte se conduise ainsi avec Bulle Eternelle. Elle était la seule à m’avoir comprise, à m’avoir prit sous ses pattes et à m’avoir aimé un tant soit peu dans ce bas monde. Je la protégerais au péril de ma vie s’il le fallait. Mais ce n’était pas ce genre de situation qu’il y avait aujourd’hui et Bulle Eternelle n’était pas là. Je défendais donc son honneur et voulais montrer à cette chatte que les guérisseurs savaient se défendre, par leurs actes ou leurs paroles.