Les feuilles de feu et d'or bercées par le vent, se balançaient doucement avant de s'envoler, légères pour retomber sur le sol humide de la forêt, s'abandonnant ainsi à leur triste sort. Celui de mourir, comme toutes les autres feuilles brunâtres, éparpillées par terre. Ainsi va la vie. On nait, on vit, avant de mourir. On ne peut changer le destin. C'est ainsi. Les arbres déployaient leurs nombreuses branches, formant ainsi des ombres mystérieuses. Le soleil rougeoyant se couchait pour laisser place aux premières étoiles. La forêt était baignée par sa douce clarté, dans son apogée. Calme elle était, magnifique elle est, mystérieuse elle restera. Mais un jour, elle finira bien par mourir. Comme tout être vivant de ce bas monde. Un écureuil, une noisette à la patte, grimpa dans un chêne aux feuilles d'or. Il bondit avec agilité sur une branche, puis une autre, avant de sauter gracieusement vers un autre arbre. Agile, la petite bête à l'épaisse queue rousse. Malheureusement maladroite, car dans son saut, elle perdit sa noisette qui tomba sur le sol avec un petit "ploc". L'écureuil partit chez lui le ventre vide. Un immense sapin se dressait vers le ciel, tendant ses branches vers l'Au Delà, comme un appel. Hélas, le ciel ne l'écoutait pas. Il se parait de sa robe de nuages aux couleurs multiples, se donnant de beaux airs. Un faucon planait de ses ailes, décrivant des cercles sans s'arrêter. Soudain, il plongea en piqué, tendant ses serres vers une malheureuse petite souris. Et hop, plus de souris. La petite bête allait servir de dîner au rapace. Celui-ci s'envola dans les airs, allant à son nid, nourrir sa progéniture. A travers les sombres arbres de la forêt, un silhouette fantomatique marchait d'un pas lent. Ses griffes frôlaient délicatement le sol, sa queue blanche et touffue se balançait de droite à gauche, comme le tic-tac d'une horloge. Fleur de Glace s'avança vers une petite clairière, éclairé par le soleil couchant. La jolie chatte dressa ses oreilles et huma l'air. Un lapin n'était pas très loin. Elle se tapit près d'un buisson, face au vent afin que le lapin ne la repère pas, puis s'avança, silencieusement, comme le fourbe serpent. Le lapin n'était plus qu'à quelques mètres. Encore un peu et le lapin serait bientôt dans sa gueule.

Respiration.

Un saut.

Et tout était fini.

Le lapin reposait en paix. Du sang tombant de son cou tombait goutte à goutte sur l'herbe. Fleur de Glace regarda le lapin. Pauvre petit être, si niais et si fragile! Mais libre. Libre de trottiner à son aise dans la foret, libre de faire ce qu'il veut, quand il veut. Pas comme la chatte à coté de lui. Elle, guerrière, devait respecter des règles, obéir. Scène étrange...Fleur de Glace pris le lapin dans sa gueule est trottina vers un arbre. Là, elle enterra le lapin avec soin, ne laissant dépasser qu'un petit monticule de terre. La chatte unicolore se redressa soudain puis se demanda dans sa tête:

Est-ce ça ma vie? Obéir aux autres, chasser, combattre? Est-ce vraiment ça! N'aurais-je pas dû rester en ville ou devenir solitaire?

Cette pensée demandait une réflexion. La chatte s'avança vers un chêne puis s'allongea, non sans pousser un soupir. N'avait-elle pas fais un sacrifice en venant dans le clan de l'Ombre? Aurait-elle dû partir, loin, et mener une existence de chat solitaire? Ces questions allaient et venaient sans cesse dans son esprit, la torturant un peu plus chaque jour. Devait-elle passait le restant de sa misérable vie dans la peau d'une guerrière? Le temps avançait, et l'envie de liberté grandissait. Oh, que n'aurait-elle pas donné pour vivre rien qu'un jour sans règles, ni contraintes, pour goûter aux plaisirs simples de la vie! Mais la liberté à un prix. Perdre des amis, une vie, une famille. Mais Fleur de Glace avait-elle seulement des amis? Selon elle, non. Elle n'était rien qu'une orpheline. Rien qu'à cette pensée, le cœur de la chatte blanche se serra. Elle aurait tant voulu voir son père, rien qu'une fois, pour lui dire ses craintes, ses malheurs! Elle effaça bien vite son idée de sa tête, de peur d'imaginer ce que Poison d'Amour - un guerrier du clan de l'Ombre- pourrait lui dire. Personne ne me comprend...se lamenta Fleur de Glace. Puis elle laissa tomber lourdement sa tête sur ses pattes avant. Le ciel commençait à se parer d'étoiles scintillantes. Fleur de Glace aurait pu passer des heures à contempler le ciel étoilé. Elle observa celui-ci de ses yeux d'azur. Une brise légère souffla doucement dans la fourrure de neige de la chatte. Elle frissonna. La nuit s'annonçait. Fleur de Glace ferma un instant les yeux. Elle vit son père, étalé par terre, agonisant dans une flaque de sang. Elle rouvrit brutalement les yeux poussant un cri et retenant avec difficulté ses larmes. Elle se releva subitement puis poussa un long soupir. Jamais elle ne pourrait se remettre de la mort de son père. Jamais. Le crime qu'avait commis le chat au pelage d'ébène resterai à jamais dans sa mémoire. Fleur de Glace marcha un peu, faisant craquer des feuilles brunies par le temps.

Sans s'en rendre compte, la chatte blanche s'était rendue aux Quatre Chênes. Elle regarda les hauts arbres, si beaux et si majestueux. Leur tronc en était formés de plusieurs, leurs feuilles d'or, se transformaient en feuilles d'argent, grâce à la demie-lune brillant dans le ciel. Maintenant, les étoiles scintillaient, offrant un spectacle magique. Fleur de Glace songea qu'il fallait peut-être mieux rentrer, mais d'un autre côté, elle se sentait bien. Pas de règles, pas de patrouille. Fleur de Glace se dirigea vers un des quatre arbres et s'allongea, apaisée.