|Pleurer avec le ciel|
Existe-t-il un réconfort plus puissant dans ce monde de brutes ?



Une goutte glacée s'écrasa contre le nez de Pluie de Larme qui ferma les yeux par réflexe. Les nuages laissaient leurs larmes perler comme des diamants au milieu d'un monde emplis de terreur et de mort. Un éclair zébra de toute sa force au loin, vers les Hautes Pierres. Puissant, précis, fin, l'incarnation même du pouvoir absolu.

Les oiseaux et les insectes se cachaient, sauf quelques gros corbeaux à la recherche de verres de terre assoiffés. Assise sur le sol humide et boueux, Pluie de Larmes fixait le ciel geindre. Elle souriait, plissait les yeux afin de ne pas avoir des gouttes désagréables dans les yeux. La chatte miaula avec le ciel qui grondait. Pleurant avec lui, une larme roula sur son beau pelage blanc. La queue enroulée autour des pattes, Pluie de Larme ne sentait pas le froid lui empoigner avec violence le corps. Elle était bien. Elle gémissait. Et pas seule pour une fois.

Le paysage s'était noircit, les arbres et l'herbe se recourbaient face à la tristesse du ciel, comme s'ils ne voulaient partager sa souffrance. Comme s'il voulaient rester égoïstes.

Un moucheron zigzaguait entre les gouttes d'eau. Mais il était trop jeune, ou trop faible ; et l'eau finit par lui tomber sur la tête comme une météorite l'écrasant sans pitié sur le sol boueux qui s'empressa de l'engloutir. Un moucheron, en temps de pluie, devait penser que c'était la fin du monde. Des météorites tombaient avec force, tout s'assombrissait, le vent rendait plus difficile leur vol, et le sol se transformait en sable mouvant gluant. C'était la mort. Mais cela ne suffisait pas à tuer la chatte blanche comme ça l'avait été pour le moucheron.

Fixant le sol, elle remarqua ses pattes boueuses et poisseuses. Elle ne prit pas la peine de les laver. Pensant avoir assez pleuré, la chatte se releva dignement. Il fallait rentrer désormais. Autour d'elle, la pluie tambourinait tellement fort que les éclairs au loin semblaient muet. Abassourdis par ce que pouvait faire des simples larmes. Pluie de Larme le savait, la tristesse pouvait faire bien plus de mal que la colère.

Soudain, un petit cri attira son attention. Elle ne chercha pas à utiliser son odorat, car par ce temps, il le lui aurait été d'une utilité complète. Se fiant à son ouïe développé, elle s'avança. Un félin, recroquevillé dans la boue miaulait toute sa peur. Il tremblait et regardait le nouveau venu comme s'il s'agissait d'un sauveur.....